Après des années de tests de produits technologiques, Linus Sebastian, le visage de la populaire chaîne YouTube Linus Tech Tips, a décidé de montrer au monde comment cela se fait correctement : le tournevis LTT a reçu des éloges unanimes de la part des amateurs comme des professionnels, souvent décrit comme « celui dont on a toujours besoin ! » Mais comment fabrique-t-on un tournevis de premier ordre ? Il s’avère que l’impression 3D a joué un rôle important dans le processus. Nous nous sommes entretenu avec Kyle Tharratt, le chef de projet, pour discuter de leur processus créatif et du parcours de trois ans depuis l’idée initiale jusqu’aux clients. Regardez la visite du studio chez LTT.
Le tournevis LTT a reçu beaucoup d’attention pour son design et ses fonctionnalités uniques. Qu’est-ce qui distingue ce tournevis des autres sur le marché ?
Le tournevis LTT est notre version d’un tournevis à cliquet multi-embouts de premier ordre. Le corps est basé sur le design fiable et reconnu de longue date de Megapro, mais il a été considérablement modifié pour répondre à nos besoins. Notre objectif était de créer un tournevis extrêmement durable fabriqué à partir de matériaux de haute qualité, doté d’un manche ergonomique qui s’adapte naturellement à votre main et réduit la fatigue pendant l’utilisation. Cela semble évident, mais il n’y a pas beaucoup de tournevis comme celui-là ! Le nôtre est doté de détails qui contribuent à offrir une expérience utilisateur inégalée, comme un rangement d’embouts facilement accessible dans le manche, un aimant puissant pour un maintien supérieur des embouts et des vis, un arbre moleté pour un contrôle de précision et un cliquet à très faible traînée arrière. Je suis extrêmement satisfait de notre résultat, tout comme des centaines de milliers de clients !
Quel était votre rôle dans le projet ?
J’étais le chef de projet sur le tournevis LTT. Cependant, je ne veux pas que cela paraisse trop élaboré, c’était un projet auquel de nombreuses personnes ici ont contribué. La réalisation du tournevis nous a pris trois ans et c’était également mon premier projet chez Linus Media Group.
Kyle Tharratt
Titulaire d’un diplôme en ingénierie des systèmes mécatroniques et de plus de 10 ans d’expérience dans le domaine, Kyle a rejoint Linus Media Group en tant qu’ingénieur de production en 2020. Depuis 2022, il est Engineering Manager au sein de la Creative Warehouse et est responsable du design des produits dérivés. Il adore la technologie et garde toujours une imprimante 3D en marche à la maison et au travail.
Quel était l’état du projet lorsque vous avez commencé ?
Lors de mon premier jour, nous n’avions qu’une idée et un modèle grossier du manche. C’était l’œuvre d’Alex Clark. Il savait ce que Linus voulait en général, mais ne savait pas exactement quelles caractéristiques le modèle devait avoir. Une partie de la philosophie de design d’Alex consiste à créer une tonne de versions différentes et à demander à Linus de les essayer toutes. Pour ce faire, nous avons utilisé notre Original Prusa MK3 pour créer tous les prototypes physiques que Linus a pu essayer et avec lesquels il a pu jouer. Après ses commentaires, Alex est revenu sur d’autres itérations jusqu’à arriver au design final : un design à trois côtés qui se place naturellement dans votre paume et s’adapte parfaitement. Grâce à ce design, vous bénéficiez d’une expérience de vissage plus confortable.
Le manche étant prêt, quelle a été votre prochaine étape dans le processus ?
Nous avions un design pour l’extérieur du manche, ainsi que des options pour l’embout et le sélecteur. Linus avait déjà choisi le sélecteur qu’il aimait, donc mon premier objectif était de choisir l’embout avec lequel nous irions. Et ce n’était pas facile. Le design est venue d’une entreprise embauchée qui nous a proposé quatre options. Et Linus avait… eh bien… des objections à chacune des quatre versions que nous avions. (rires) Donc ce que j’ai fait, c’est que j’ai imprimé en 3D l’ensemble du tournevis et poncé certaines couches pour qu’il ressemble le plus possible au produit final. J’ai utilisé la fonction du PrusaSlicer consistant à insérer une pause pour placer des aimants dans le manche et environ 17 embouts différents que j’ai designé. Ensuite, j’ai demandé à Linus de tenir le tournevis et j’ai changé les embouts jusqu’à ce qu’il en sente un qu’il voulait. Nous avons finalement abouti à quelque chose qui était très proche de l’aspect final, seulement plus carré, un peu comme une boîte. Un peu de SolidWorks plus tard, en essayant différents angles et prototypes, nous étions prêts et Linus a écrit le chèque à l’entreprise d’outillage. Et wow, c’était une somme à six chiffres ! Et c’est à moi qu’il revient d’avoir le dernier mot – est-ce que nous sommes prêts ?
Étiez-vous nerveux à l’idée de dépenser tout cet argent ?
Qu’est-ce que vous croyez ? (rires) Avant de prendre la grande décision, j’ai utilisé la SL1 pour réaliser un prototype aussi précis que possible, juste pour être sûr. Le modèle imprimé en résine était aussi précis dimensionnellement que je pouvais le faire avec la technologie dont je disposais : il avait le sélecteur final, le manche et le capuchon d’extrémité, ainsi que toutes les caractéristiques internes. Je l’ai donné à Linus en disant : « Voilà ce que nous allons fabriquer. » Et nous l’avons fait.
Pourquoi avoir opté pour le corps noir et le capuchon orange ?
Une histoire amusante est que je n’avais pas le capuchon d’extrémité fonctionnel de la société de moulage par injection lorsque nous nous préparions à présenter le prototype fonctionnel. Mais j’avais celui imprimé en 3D. Le tournevis était censé être entièrement noir avec la pièce moulée par injection, mais j’ai installé l’orange imprimée en 3D, je l’ai donné à Linus et j’ai dit : « C’est le prototype numéro un. » Et il l’a posté sur Twitter environ 20 minutes plus tard. Et c’est ainsi qu’est né le tournevis orange : tout le monde a répondu : « Le tournevis orange est génial, je le veux ! » Cette histoire est peut-être amusante à raconter, mais elle montre à quel point les prototypes imprimés en 3D étaient précis. Je pourrais simplement en prendre un et le mettre sur un produit final, et cela fonctionnerait à merveille.
À quoi cela ressemble de designer des outils et des produits pour Linus ?
Linus est un créateur de type découverte. Il crée en expérimentant et en discutant de la manière dont il pense que cela pourrait être amélioré. Le mieux est donc de lui mettre quelque chose de physique dans la main. C’est comme cela qu’Alex a progressé avec son manche – Linus avait une vague image d’un meilleur tournevis que celui qu’il avait utilisé à l’époque. Alors Alex lui a mis une idée entre les mains, et il a répondu en lui donnant son avis. D’autres itérations ont donc été réalisées, ce qui a donné naissance à davantage d’idées.
Quel est l’avantage le plus significatif pour un ingénieur de production comme vous lorsqu’il utilise l’impression 3D ?
L’impression 3D a été essentielle dans la création du tournevis, et elle est utilisée dans tous nos projets d’ingénierie à la Creative Warehouse car elle réduit le temps passé à parler à Linus. (rires) Comme je l’ai décrit, il est préférable de l’approcher avec quelque chose de physique, et cela réduit tout le cycle de développement. Il suffit de quelques heures pour imprimer des objets en 3D. Nous pouvons donc réaliser sept à huit exemples de ce que nous essayons de créer en une semaine. Lorsque vous devez choisir entre plusieurs options, je trouve qu’il est préférable de créer plusieurs prototypes différents plutôt qu’un à la fois. Vous pouvez simplement mettre de côté ceux que Linus déteste et combiner les caractéristiques qu’il a appréciées sur d’autres. D’une certaine manière, cela nous donne un meilleur moyen de communiquer avec Linus – cela nous donne un canal vers la partie de son esprit où il a toutes ces grandes idées. Cela les transforme en choses réelles. Si on lui demandait simplement : « Que devrions-nous faire ? », il répondrait : « Réaliser le meilleur tournevis du monde ! » Ce serait tout. (rires) Avec l’impression 3D, vous obtenez un retour rapide, des directives et davantage d’idées avec lesquelles travailler.
Une présentation sous forme de modèle CAO ne serait-elle pas plus efficace ?
Montrer des modèles CAO à Linus ne fonctionne pas toujours ; ce n’est tout simplement pas la même chose. Il en va de même pour un rendu : cela peut fonctionner pour le design d’un t-shirt, mais pas lorsque vous devez prêter attention à des éléments tels que sentir la poignée dans votre paume ou mesurer le poids… Le poids est un excellent exemple : il peut vous en dire beaucoup sur un produit. Si vous prenez un tournevis et qu’il est léger, neuf fois sur dix, les gens diront qu’il est bon marché. Lorsque vous prenez un tournevis, vous devez sentir un certain poids.
Quand on a affaire à un gars comme Linus, qui a le sens de la qualité, il faut qu’il puisse prendre les choses en main et être sûr de lui : « Si c’est la pièce finale, alors je suis content. » Sans imprimante 3D, on est obligé de faire des choses qui nécessitent une fabrication soustractive traditionnelle, ce qui implique beaucoup de complexité et de temps. Si vous essayez de donner forme à vos pensées et à vos idées, l’impression 3D peut vous y aider.
L’impression 3D est-elle judicieuse en termes de coût ?
Plus vous parvenez à réduire le coût du prototypage, plus vous pouvez créer de prototypes. C’est simple, n’est-ce pas ? Chaque fois que vous réalisez un produit, il y a des coûts, et il faut en faire une analyse de rentabilité. Lorsque je présente de nouveaux produits à la direction, je dois prendre en compte le temps d’ingénierie et les coûts de prototypage. Même si vous ne voyez pas cela souligné sur la feuille des revenus moins les coûts, cela compte. Si nous fabriquions un tournevis performant mais au prix de millions et de millions de dollars de prototypage, nous ne tirerions jamais aucun profit du produit. Mais grâce à l’impression 3D, nous pourrions réduire ces coûts tout en continuant à réaliser un prototype efficace ! En gros, vous ne voulez pas dépenser des milliers quand vous pouvez en dépenser des centaines, n’est-ce pas ? Le temps, c’est de l’argent. Passer un mois sur un prototype que Linus prend en main et déteste, ce n’est pas de l’argent bien dépensé, n’est-ce pas ? Alors, imprimez en 3D, itérez, échouez – mais échouez à moindre coût – essayez à nouveau.
Vous souvenez-vous de vos débuts dans l’impression 3D ?
Je suis un fervent défenseur de l’impression 3D depuis ses débuts, à l’époque où il fallait contrôler l’imprimante via une ligne de commande et imprimer à partir de ce matériau ABS étrange qui ne méritait pas d’être appelé filament. Ma première imprimante 3D était une MendelMax 1.5 que j’ai construite moi-même et qui n’a duré qu’une seule impression. (rires) J’ai complètement détruit l’extrudeur. Mon intérêt pour cette technologie s’est accru plus tard lorsque le PLA est devenu disponible – et depuis lors, j’ai toujours eu plusieurs imprimantes 3D à la maison et au travail. En tant que concepteur mécanique, vous ne pouvez pas NE PAS en avoir une, à mon avis. Mais ce n’est que moi. (sourires) En dehors du PLA et du TPU, j’utilise uniquement du PA12 sur une imprimante 3D SLS. Tout simplement parce que c’est la chose la plus proche d’un produit final que je puisse fabriquer, il a des propriétés similaires à celles de nos produits moulés par injection. Et nous pouvons prédire toutes sortes de problèmes grâce à cela.
Le jour viendra-t-il où vous utiliserez des éléments imprimés FDM comme produits finis ?
Cela se produit déjà : si vous imprimez quelque chose et que quelqu’un l’achète, c’est un produit final ! (sourires) Par exemple, les accessoires NERF sont pour la plupart imprimés en 3D et se vendent comme des petits pains. Il existe de nombreuses fermes d’imprimantes et elles font un excellent travail ! Pour notre part, le jour viendra peut-être, mais ce n’est pas quelque chose sur lequel nous nous concentrons actuellement car ce n’est pas notre cœur de métier.
Jakub Kmošek et Štěpán Feik
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